Une journée avec Jonas Kaufmann

"Nessun dorma, The Puccini Album"

12 septembre 2015 : la journée d’hier s’annonçait bien, un entretien réalisé entre deux Fidelio à Salzbourg était le fil rouge d’une journée entière consacrée à Jonas Kaufmann sur France Musique et dès l’aube, on pouvait acquérir son nouvel album.
C’est cliniquement démontré, la voix du ténor est recommandée pour le bien-être et l’harmonie car cette espace réservé fut un long moment de pure jubilation et de profondeur. 
Jonas Kaufmann nous en apprend à chaque fois sur sa façon d’apprendre. Curiosité intellectuelle et passion de l’art, ses interviews sont toujours érudites et tranchent superbement avec la banalité habituelle. On adore sa façon de dessiner les contours de ses personnages avant toute prise de rôle, propos fondateurs de son inventivité théâtrale, lui qui se moule dans leur âme une fois sur scène. 
Et pour la nouveauté musicale, j’ose une anaphore lyrique.


Nessun dorma est un grand album, Jonas Kaufmann s’impose comme un ténor hors norme et hors mode, force tranquille au timbre ensorcelant.
Nessun dorma est un grand album, qui d’autre que lui peut provoquer cette ivresse extatique de la beauté d’une voix, jouer du souffle jusqu’à cette puissance d’acier, sculpter le son dans la mezza di voce, se laisser dévorer par les sentiments sans perdre le contrôle.
Nessun dorma est un grand album, porté par la magie d’Antonio Pappano, de l’orchestre incroyablement riche et raffiné qu’il faut franchir avec éloquence par des aigus déchirants. 
Nessun dorma est un grand album, partitions pucciniennes rêvées pour une voix superlative, soumise à l’exigence d’une tension musicale extrême.
Nessun dorma est un grand album, Puccini impose de se consumer, non seulement en notes escarpées mais en incarnation et en drame, jusqu’au plus haut degré d’ébullition.
Nessun dorma est un grand album, l’émotion affleurant aux lèvres, comble de l’art que de traduire dans l’évidence la vérité expressive de la vie.
Nessun dorma est un grand album, le ténor pourrait faire sienne cette citation de Puccini lorsqu’il compose Tosca "Quand je chante ("j’écris" disait le compositeur) un opéra, je cherche avant tout à être sincère, à être vrai, et à donner, de toutes mes forces et par tous les moyens, le sens de la vie."

Pour ceux qui n’ont pu écouter cette interview, les propos recueillis par Stéphane Grant sont en réécoute sur France Musique. De sa découverte précoce de l'opéra aux secrets d’une voix et d’une technique, la passion brille autant derrière le micro que sur scène. "Un moment fabuleux" confesse-t-il, que celui où il se perd dans l’émotion et dans la beauté de la musique.

Il est impatient de chanter son premier Otello, ce sera en juin 2017 au Royal Opera House de Londres avec Antonio Pappano. Son agenda est calé jusqu’en 2021 mais c’est maintenant qu’il décide les autres grands rôles. Ce sera enfin le temps du premier Tristan qu’il porte en lui dramatiquement et du premier Tannhäuser

Ce tête à tête enregistré en août à Salzbourg arrive au moment où son actualité française n’a jamais été aussi riche. Un retour à l’Opéra de Paris, après cinq ans d'éclipse, avec La Damnation de Faust de Berlioz en décembre et quatre soirées avenue Montaigne d’ici juin 2016 : Récital Puccini, Ariane à Naxos de Richard Strauss, le Chant de la Terre de Mahler et les Wesendonck leaders de Wagner. 

Epilogue d’une journée bien remplie avec son Andrea Chénier, toujours sous l’œil bienveillant du Maestro Pappano, enregistré à Londres en janvier dernier, l’une de ses cinq prises de rôle de la dernière saison.
Et pour les mois à venir, il y aura de nouveaux rôles : Radamés dans Aïda de Verdi et Walther von Stolzings dans Les Maîtres Chanteurs de Nuremberg de Wagner à Munich. Mais aussi, Des Grieux à New-York, Don José à Londres et Mario à Vienne et Munich.

Photos © Julian Hargreaves / Sony Classical

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