Anna Harteros (Madeleine de Coigny), Jonas Kaufmann (Andrea Chénier) Photos © Wilfried Hösl / BSO |
7 avril 2017 : Magnifique spectacle consacré par le talent d’artistes d’une classe folle. Un débordement d’enthousiasme a couronné cette dernière représentation d’Andrea Chénier au Bayerische Staatsoper. Interminables rappels, joie exaltée des chanteurs, ferveur des spectateurs reconnaissant le prix de tels trésors.
Umberto Giordano consacre son opéra à ce poète français qui s’était laissé séduire par l’idéal révolutionnaire. Le triomphe de la première milanaise en 1896 fut le prélude à son succès mondial. Pourtant, une certaine frilosité à le monter s’installa au XXème siècle, certains théâtres qualifiant l’œuvre de "contre-révolutionnaire". Il fallut attendre 2009 pour que l’Opéra de Paris l’inscrive à son répertoire et 2017 pour l’Opéra de Bavière.
Autre raison majeure, cette partition d’un lyrisme torrentiel exige du héros un investissement dramatique et vocal d’une intensité inouïe. Même à sa création, le compositeur peina à trouver son interprète, et depuis, seuls les plus grands ténors s’en emparent.
Taillé sur mesure pour le rôle écrasant d’Andrea Chénier, Jonas Kaufmann vient de défier les récentes publications des déclinologues. Le ténor a retrouvé le plein épanouissement de ses aigus, ses nuances, son impact musical, et par là même, son sourire radieux. Oubliés les mauvais jours de doute, on lui souhaite la plus belle des longévités pour apprécier encore et encore la beauté poétique et les vertus héroïques de son chant : sensible "Un dì all'azzurro spazio", aérien "Ora suave" qui enfle et se colore, défiance virile dans "Si fui soldato" alors qu’il vient de se jeter au sol et divin "Come un bel dì di Maggio".
C’est l’accord parfait avec Anja Harteros. Ces deux artistes s’entendent à merveille, le plaisir et la connivence les animent. Leur duo d’amour au II embrase le public et la montée à l’échafaud conclue le spectacle en apothéose.
Sublime Madeleine de Coigny, la soprano est follement acclamée. Don d’une voix naturellement belle aux possibilités infinies. Couronné de grâce et de fragilité, son aria "La mamma morta" entrouvre le ciel. Une onde de chant qui irradie, jusqu’à l’ut glorieux.
Baryton souverain, Luca Salsi impressionne tout autant dans le rôle de Carlo Gérard. Sonore et habité, son monologue "Nemico della Patria" au III emporte une tonitruante adhésion.
Philipp Stölzl vient du cinéma, sa scénographie inventive illustre la réalité d’un monde coupé en deux que la Révolution Française va inverser. La noblesse inconséquente sur les étages supérieurs et les serviteurs réduits à l’esclavage dans des caves. Brillante reconstitution historique d’une époque avec son idéal démocratique et son tribunal révolutionnaire menant à l’échafaud.
Détails des costumes, décors somptueux, transformation astucieuse de l’espace en tableaux superposés et mobiles, mise en scène fourmillant d’idées et d’actions, travail d’acteurs irréprochable. Un très beau spectacle théâtral et lyrique dont l’intensité croissance emporte jusqu’au choc final.
Sous la baguette d'Omer Meir Wellber, l'Orchestre du Bayerische Staatsoper déploie toutes les couleurs du vérisme, de l’élégance poudrée du I aux effusions les plus extatiques du IV.
A l’occasion de cette première locale, le programme Bleu-Blanc-Rouge étoffé de 250 pages est un véritable cours d’histoire sur la Révolution Française: personnages historiques, chronologie des événements, destin et poèmes de Chénier, et textes des chants (La Marseillaise, La Carmagnole).
Andrea Chénier, Bayerische Staatsoper, 2 avril 2017
Photos BSO © Wilfried Hösl
ne pouvant aller moi meme a l'opera, j'espere de tout mon coeur qu'il y aura un dvd, ainsi que pour les maitres chanteurs de nuremberg car le live streaming etait sans le merveilleux jonas kaufmann. merci par avance et un grand bravo a ces formidables artistes.
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