Jonas Kaufmann - TCE, 19 mai 2016 |
23 mai 2016 : Entre deux représentations des Maîtres Chanteurs de Nuremberg à Munich, Jonas Kaufmann est venu chanter les Wesendonck Lieder de Richard Wagner au Théâtre des Champs-Elysées, sous la baguette de Daniele Gatti avec l’Orchestre National de France.
Une parenthèse dans l’agenda du plus merveilleux interprètes actuels de Wagner. Jonas Kaufmann a cette capacité de dessiner l’univers de l’ouvrage tout en profondeur et sensibilité, dans l’instant.
Le chanteur de lieder était à l’œuvre le 19 mai dernier dans le théâtre parisien. Et la salle retint son souffle, absorbée par la ligne vocale touchante, la douceur des mots et ce souffle subtilement filé.
Beauté de la langue allemande, beauté des poèmes des Wesendonck Lieder, on y trouve les thèmes chers au romantisme : l’amour, la nature, la souffrance qui amène l’homme au silence et à la mort.
Avec ces lieder, Wagner crée des airs d’une grande sensibilité que l’on retrouvera ensuite dans ses opéras, notamment Tristan et Isolde et La Walkyrie. Il en avait une très haute opinion: "Je n’ai jamais rien fait de mieux que ces lieder. Très rares sont mes autres œuvres qui peuvent souffrir la comparaison" (Lettre à Mathilde, 1858).
Avec ces lieder, Wagner crée des airs d’une grande sensibilité que l’on retrouvera ensuite dans ses opéras, notamment Tristan et Isolde et La Walkyrie. Il en avait une très haute opinion: "Je n’ai jamais rien fait de mieux que ces lieder. Très rares sont mes autres œuvres qui peuvent souffrir la comparaison" (Lettre à Mathilde, 1858).
Contraint à l'exil en 1852, Richard Wagner est recueilli par Otto Wesendonck, un banquier philanthrope de Zurich. A son bienfaiteur, il exprime sa reconnaissance par la cour qu’il fait à sa femme. Une idylle nait entre Richard et Mathilde, celle-ci n’est pas insensible à la réputation grandissante du compositeur. Au moment où il entreprend l’écriture de Tristan, elle lui fait parvenir ses poèmes. Aussi subjugué par la belle que par ses belles lettres, Richard se lance dans une intimité ardente et créatrice avec sa muse et poétesse. Ainsi naissent les Wesendonck Lieder, l’un des plus beaux recueils de lieder du XIXe siècle.
Mathilde Wesendonck |
C’est la seule fois que Wagner daigna laisser une autre personne que lui écrire le texte de ses musiques, laissant une grande part de liberté à la femme d’un de ses mécènes afin de pouvoir la voir régulièrement.
Wagner décide de mettre en musique les cinq poèmes de Mathilde Wesendonck : Der Engel (L’Ange), Stehe still! (Reste tranquille !), Im Treibhaus (Dans la serre), Schmerzen (Douleurs) et Träume (Rêves).
Selon Wagner lui-même Im Treibhaus et Träume, sont des études pour Tristan et Isolde. Il a d’abord écrit ces chansons pour voix féminine et piano, puis a réalisé une version orchestrée de Träume, pour être exécutée par un orchestre de chambre sous la fenêtre de Mathilde à l'occasion de son anniversaire en décembre 1857.
La création a eu lieu près de Mayence le 30 juillet 1862 sous le titre de cinq chansons pour voix féminine. L'orchestration du cycle entier a été accomplie pour orchestre symphonique par Felix Mottl, le chef d'orchestre de Wagner.
Selon Wagner lui-même Im Treibhaus et Träume, sont des études pour Tristan et Isolde. Il a d’abord écrit ces chansons pour voix féminine et piano, puis a réalisé une version orchestrée de Träume, pour être exécutée par un orchestre de chambre sous la fenêtre de Mathilde à l'occasion de son anniversaire en décembre 1857.
La création a eu lieu près de Mayence le 30 juillet 1862 sous le titre de cinq chansons pour voix féminine. L'orchestration du cycle entier a été accomplie pour orchestre symphonique par Felix Mottl, le chef d'orchestre de Wagner.
Der Engel (L’Ange), évoque la rédemption dispensée par l’Ange à celui dont le cœur saigne. L’évocation du chagrin, puis vient "Erlösung", la délivrance ou plutôt la rédemption spirituelle. La voix retrouve son calme, une harmonie très proche de Tristan et Isolde, l’amour comme clé de la délivrance.
Stehe still! (Reste tranquille !), les angoisses du temps et l’incertitude du destin. L’ombre du Vaisseau fantôme et son harmonie tourmentée "Arrête toi, force génératrice, pensée originelle qui crée éternellement ! Retiens ton souffle, calme ton élan, tais toi pour une seule seconde". Puis le tempo se calme, la rédemption dans l’amour véritable. "Quand l’âme se noie toute dans une autre, (…), et que le cœur n’a plus aucun souhait, alors l’homme reconnaît le signe d’éternité."
Im Treibhaus (Dans la serre) sonne comme un adieu. Il évoque la tristesse de la vie devant la désillusion et le désespoir. Le personnage associe son destin douloureux à celui de la nature. "Celui qui souffre vraiment s’enveloppe dans le sombre manteau du silence".
Schmerzen (Douleurs), hymne au soleil qui tous les soirs meurt pour renaître le lendemain, la mort comme passage dans une nouvelle vie. Les souffrances sont plus supportables dans l’espoir d’une vie remplie de joie. La porte de sortie spirituelle, remercier la nature des souffrances prodiguées comme une étape de l’initiation à la sortie du temps. "Oh, comme je suis reconnaissant que la nature m’a donné de tels tourments".
Träume (Rêves) évoque les rêves merveilleux qui embrasent l’âme, non sans l’aide d’une nature idyllique mais qui à la fin "disparaissent dans le tombeau". Le cycle se termine magistralement par une nouvelle étude pour Tristan, montrant le refuge dans le rêve, l’entrée dans l’éternité et le cycle immuable de la nature.
Les cinq mélodies regroupent à elles seules une grande part de la spiritualité de Richard Wagner. On y retrouve tous les concepts du temps, de la vie, de la mort, du renoncement et de l’amour suprême conduisant à la compassion ultime. Pour Wagner, la libération (rédemption) se trouve dans le renoncement au monde qui permet d’atteindre l’Amour (compassion) qui seule autorise l’accession à l’éternité.
Sources :
Richard Wagner par Gérard Denizeau, Bleu nuit éditeur, collection Horizons
Richard Wagner par Gérard Denizeau, Bleu nuit éditeur, collection Horizons
Mathilde Wesendonck par Jean-Marc Onkelink, blog "En avant la musique"
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