Werther au Royal Opera House

Juan Diego Flórez délicieusement romantique

Juan Diego Flórez et Isabel Leonard 
© 2019 ROH / Catherine Ashmore
27 septembre 2019: Quoi de plus envoûtant que cet ouvrage de Massenet où la beauté désarmante des mélodies, la mélancolie douloureuse d’un solo d’instrument, la grâce et la délicatesse dressent les contours de son Werther sombre et poétique. Rarement élan, étreinte et souffrance n’avaient trouvé parfaite expression musicale de la tectonique des sentiments. 

Créée à Londres en 2004 puis à Paris en 2009, la production de Benoît Jacquot répond merveilleusement bien au pouvoir magnétique et lyrique de cette musique. Modèle d’élégance et de raffinement, elle appartient au panthéon des spectacles où tout est réussi, où la symbiose des décors, lumières, costumes et de la musique alimentent notre insatiable curiosité de la revoir. 

Plaisir intense de retrouver Juan Diego Flórez dans le rôle-titre pour la première fois à Covent Garden face à la mezzo américaine Isabel Leonard dans le rôle de Charlotte. 

La Traviata de Verdi à Paris

© Charles Duprat / OnP
Violetta connectée

18 septembre 2019: A Garnier, l’éternelle Traviata a les yeux de Pretty Yende. En gros plan, tel un tableau animé, son immense regard intense et fardé nous capte alors que le rideau n’est pas encore levé. La soprano sud-africaine incarne Violetta, casse les codes pour se métamorphoser en jeune femme indépendante à l’ère du numérique, et on la retrouve dans un nouveau rôle toute en fraîcheur et vibrante d’émotions.
 
La nouvelle production de Simon Stone fait bouger les lignes du temps. Le jeune metteur en scène australien parvient à déconstruire l’intrigue du XIXème siècle en l’inscrivant avec talent dans l’essence même du monde contemporain. Violetta gagne sa vie avec son image sur les réseaux sociaux. Influenceuse de mode, égérie de la marque de parfum "Villain", sa vie branchée défile sur les écrans, quantifiée en "followers", "like", émoticônes et cœurs. Sur un plateau tournant agrémenté d’immenses projections d’écrans familiers de WhatsApp, Facebook ou Instagram, la scénographie rend compte de sa boulimie de vie juvénile, de ses excès superficiels comme du tragique, de la mélancolie et de la douloureuse issue. 

Les Puritains de Bellini à l’Opéra Bastille

L'amour en cage

©Andrea Messana /OnP
16 septembre 2019 : Après une longue pause estivale, c’est un bonheur de retrouver le génie mélodique de Bellini: Les Puritains reviennent à l’Opéra de Paris dans la production de Laurent Pelly. Composé peu de temps avant la mort du compositeur à l’âge de 34 ans, cet ouvrage est un florilège de mélodies somptueuses. Ces magnifiques pages - parmi les plus belles de l’opéra italien du XIXème siècle - furent écrites sur mesure pour un quator de très grandes voix de l’époque. Les jeunes talents qui l’abordent ne doivent pas être trop frileux.
 
Laurent Pelly choisit les yeux d’Elvira pour nous raconter l’histoire dans "l’univers mental et rêveur du sujet principal qui reste Elvira et sa couleur émotionnelle fantomatique et translucide". Précédée d’une réputation flatteuse, Elsa Dreisig s’empare du rôle de l’héroïne romanesque pour la première fois avec un engagement total. La beauté du timbre, l’aisance et la rondeur des aigus et son innocence poétique sont un enchantement. 
Francesco Demuro campe un Arturo solide et d’une grande générosité. Dans le dernier acte, il affronte avec vaillance et élégance les redoutables aigus. Igor Golovatenko est tout en noirceur et arrogance dans le rôle de Lord Riccardo Forth. 
A Nicolas Testé échoit le beau et noble rôle de Sir Giorgio. Mélodieux et touchant, il remporte un beau succès personnel légitime aux saluts.