Voix d’outre-monde et aigus immortels
© Opernhaus Zürich
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20 juillet 2014 : Lorsque Edita Gruberova entre sur la scène de l’Opernhaus de Zürich, on se
réjouit d’avance de cette soirée au contact de l’un des derniers monstres
sacrés de l’opéra.
La soprano slovaque foule les plateaux depuis plus de 45
ans, triomphant à Munich, Vienne et Barcelone avec ce rôle fétiche d’Elisabeth
1ère d'Angleterre. Dès son entrée, l’artiste domine parfaitement ses moyens
vocaux, se jouant de sa technique, trillant, pianissimant, tonitruant…et enflammant
le public subjugué par son art.
Roberto Devereux est l’une des pièces maîtresses de son
répertoire. Ce soir, Edita Gruberova vient encore de démontrer qu’elle est une
Elisabeth hors d’atteinte à près de 68 ans. L’attaque sidérante de ses aigus,
sa projection phénoménale et sa présence scénique font de chacune de ses
apparitions un moment d’intensité incomparable. A ses côtés, son compatriote,
le jeune ténor Pavol Breslik campe
un Roberto Devereux pénétré ; son timbre séduisant et sa voix claire et
lumineuse font des merveilles face à la diva. La séduction vocale et
l’implication scénique de Veronica
Simeoni en Sara et d’Alexey Markov,
le duc de Nottingham, parachèvent l’enchantement de cette représentation.
© Opernhaus Zürich |
Gaetano Donizetti fût très inspiré par la Renaissance
anglaise et il en élabora trois opéras, exploitant ainsi le filon historique et
tragique de la dynastie des Tudor.
Roberto Devereux est le dernier épisode conçu en 1837 et consacré aux dernières amours élisabéthaines. Auparavant, il compose Anna Bolena en 1830, racontant la désaffection du roi Henri VIII pour son épouse Anne Boylen (les parents d’Elisabeth) pour les beaux yeux de Jane Seymour. Puis dans Maria Stuarda écrit en 1834, il s’inspire de la rivalité explosive de la jeune Elisabeth et de Marie Stuart, sa cousine et reine d’Ecosse. Deux reines partagent de tendres sentiments pour le comte de Leicester, un autre favori d’Elisabeth, mais les complots successifs de Marie Stuart lui feront perdre la tête sur le billot.
Roberto Devereux est le dernier épisode conçu en 1837 et consacré aux dernières amours élisabéthaines. Auparavant, il compose Anna Bolena en 1830, racontant la désaffection du roi Henri VIII pour son épouse Anne Boylen (les parents d’Elisabeth) pour les beaux yeux de Jane Seymour. Puis dans Maria Stuarda écrit en 1834, il s’inspire de la rivalité explosive de la jeune Elisabeth et de Marie Stuart, sa cousine et reine d’Ecosse. Deux reines partagent de tendres sentiments pour le comte de Leicester, un autre favori d’Elisabeth, mais les complots successifs de Marie Stuart lui feront perdre la tête sur le billot.
Lorsque Donizetti compose Roberto
Devereux, sa vie elle-même vient d’être marquée par la tragédie : la
mort de son père et de sa femme de 29 ans qui vient de donner naissance à un enfant mort-né. L’ouvrage délivre une intensité dramatique et musicale rarement
atteinte par le compositeur que certains rattachent aux circonstances
personnelles dramatiques ayant entouré sa composition.
De g. à d.:
Alexey Markov, Edita Gruberova,
Pavol Breslik et Veronica Simeoni
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Le livret de Roberto
Devereux est inspiré d’une des dernières péripéties du règne d’Elisabeth, le complot de Roberto Devereux. Après plus de 40 ans de règne, la
souveraine se rapproche du charmant comte d’Essex. Mais son brillant favori, et
son cadet de 30 ans, va prendre quelques libertés vis à vis de son pouvoir
jusqu’à tenter de soulever la population londonienne. Il échouera et sera décapité.
La reine vieillissante en nourrît d’éternels regrets et un observateur de
l’époque rapporta "son plaisir était
de s'asseoir dans le noir et parfois de verser des larmes pour pleurer
Devereux".
Lorsque le rideau se lève, Roberto Devereux, comte d’Essex,
attend son procès pour trahison. Il a été l’amant de Sara, duchesse de
Nottingham et a eu les faveurs de la reine Elisabeth. Le duc de Nottingham,
jaloux de Devereux, précipitera sa chute ainsi que la sienne et celle de Sara. Folle
de douleur et en proie à une vision terrible de la couronne d’Angleterre
baignant dans le sang, Elisabeth renonce au trône, contrainte de désigner un
Stuart à sa succession.
Giancarlo Del Monaco a conçu une mise en scène épurée et
élégante avec de somptueux costumes de l’époque élisabéthaine. Un unique décor évolue
par touche pour symboliser la salle du trône ou la prison d’où
descendent les fers du condamné. Assis dans des loges cernant l’espace
scénique, les chœurs sont les témoins immobiles des nobles déchirements. Décor imaginaire
d’une scène de théâtre où les chanteurs-acteurs avancent seuls en scène comme une
priorité donnée à la beauté du chant.
Edita Gruberova aux saluts |
Edita Gruberova apparaît dans un halo de lumière vibrant de
tout son corps, le pas hésitant, s’appuyant sur une canne. Image presque
onirique d’une reine à la dérive qui semble rassembler toutes ses forces pour
un dernier défi. Elle s’envole dans "Ah Ritorna Qual Te Spero" plein d’agilité, parant son chant plantureux de ses aigus filés. Dans la longue
scène finale et le bouleversant "Quel sangue versato al cielo", une reine
désespérée se noie dans sa douleur. La rage et la démence cognent aux tempes
royales et l’obscurité s’empare de la raison. Cette scène finale de colère
shakespearienne aux frontières de la folie est de celles que l’on ne voit
qu’une seule fois dans sa vie de mélomane. Lorsque la lumière revient, la
soprano reçoit une indescriptible standing
ovation. Image émouvante d’une femme généreuse dont le visage garde
l’empreinte de cette intensité qui a mis l’auditoire à ses pieds. Edita
Gruberova est l’une des dernières divas miraculeuses à déclencher
d’interminables ovations. Comble de bonheur pour ses enthousiastes admirateurs,
la Prima Donna assoluta endossera de
nouveau le costume d’Elisabeth à Munich en avril prochain.
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Scène finale "Quel
sangue versato al cielo" par Edita Gruberova
Roberto Devereux - Production de l’Opéra de Munich en
2005
Roberto Devereux -
Opéra en 3 actes de Gaetano Donizetti (1837)
Mise en scène de Giancarlo del Monaco - Décors et costumes
de Mark Väisänen
Edita Gruberova (Elisabeth Ière), Pavol Breslik (Roberto
Devereux), Veronica Simeoni
(Sara), Alexey Markov (Le duc de Nottingham), Dmitry
Ivanchey (Lord Cecil), Dimitri Pkhaladze (Sir Gualtiero Raleigh),
Orchestre Philarmonia de Zürich - Chœurs de l’Opéra de
Zürich - Direction musicale de Andriy Yurkevych
Opéra de Zürich, 13 juillet 2014
Opéra de Zürich, 13 juillet 2014
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