Rossini, 150 ans plus tard

13 novembre 2018 : Il y a 150 ans aujourd’hui disparaissait Rossini, un vendredi 13 de novembre 1868. 
Ses biographes ont souligné son extraordinaire précocité et son étonnante fécondité qui lui valurent très tôt une popularité inégalée à l’époque. 

De 18 à 37 ans, il compose la totalité de ses opéras, 39 œuvres et une révolution dans l’écriture. Tancrède et l’Italienne à Alger à Venise en 2013 lui apportent la gloire à 21 ans. 
Trois ans plus tard, Le Barbier de Séville, écrit en 16 jours, est un succès retentissant. Il sillonne l’Europe pendant 4 ans, devient Directeur du Théâtre Italien de Paris, ville où il compose Le Comte Ory (1828) et Guillaume Tell (1829). 
En 1830, la Révolution de juillet lui fait perdre sa place et, à l’âge de 37 ans Rossini abandonne définitivement le théâtre lyrique.

Pourtant, dans l’ouvrage "Aspects de la critique musicale au XIXe siècle" (*), on découvre que la Révolution Rossini nourrit une importante critique musicale en France. Dans les années 1820, le Maestro avait quitté l’Italie pour Paris et les meilleurs esprits de l’époque entrèrent dans l’arène pour le défendre ou le critiquer. 

Créations et réception des opéras de Rossini en France de 1817 à 1829 :

L’Italienne à Alger
Son premier opéra mis en scène à Paris tomba sous les assauts de la critique qui dénonce "l’absurdité de l’ouvrage"; il n’y eut que 5 représentations de cette "turquerie bouffe". 

Le Barbier de Séville
Un critique n’hésite pas à évoquer la dégénérescence de la musique italienne et déplore l’absence d’airs, le fracas du finale du premier acte, de l’orage au second, pour conclure qu’il s’agit d’une "composition faible, incohérente, sans caractère, sans unité". 

Otello
Malgré le succès de l’ouvrage, les critiques ne désarment pas et lui reprochent ses fautes de syntaxe en lui opposant la pureté de la grande tradition italienne et le bon goût français. 
Stendhal ridiculise alors les détracteurs de ce jeune compositeur de 29 ans, en les présentant comme une assemblée de "vieux" professeurs, académiciens, membres de l’Institut, passéistes, épris de règles, entichés de poétiques tout juste bonnes à stériliser le génie créateur, bref des classiques. Stendhal propose comme seul critère de jugement esthétique le plaisir : "Ce sont les spectateurs qui font la renommée : la bonne musique est celle qui plaît". 

Tancrède
Le public est dérouté par cet androgyne musical. Le rôle du chevalier Tancrède est confié à la cantatrice Giuditta Pasta, dont le "travestissement" passe mal. Reproches au livret, trop écarté de la tragédie de Voltaire, le dénouement heureux étant alors la convention de l’opéra. 

La Donna del Lago
Accueil assez froid du public pas préparé à apprécier la voix de contralto pour le rôle de Malcolm, préférant le brillant de la tessiture de soprano. Pour les reprises successives, la distribution ne parvint jamais à une homogénéité satisfaisante. 

Guillaume Tell
Rossini épouse les tendances du romantisme et compose un grand opéra français profondément novateur sur le mythe fondateur de la Suisse. La presse se déchaîna unanimement contre le livret "si long, si lent, si lourd". 
La musique fut mieux reçue mais selon un chroniqueur : "tout se succède et s’enchaîne selon de nouvelles lois, tout, jusqu’à cette marche entraînante, moitié militaire, moitié barbare". Dans cette réception en demi-teinte, Berlioz s’insurge "Je crois que tous les journaux sont décidément devenus fous". 
Malgré les polémiques et l’incompréhension du public comme de la critique, l’œuvre resta au répertoire et son succès grandit avec le temps. 

Fait musical majeur, Rossini a contribué à faire évoluer l’opéra par son invention mélodique et rythmique. Un plaisir immense ressenti par le public de la part du compositeur qui est allé au bout de son chemin d’audaces, éloignant à jamais l’ennui à l’opéra !


(*) Source, ouvrage de Sylvie Triaire et François Brunet. Presse Universitaire de la Méditerranée

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