Le Postillon de Lonjumeau à l’Opéra Comique

Photo © Stefan Brion / Opéra Comique
Coloré et survitaminé !
4 avril 2019 : L’ouvrage d’Adolphe Adam retrouve la scène qui l'a vu naître. Sa création en 1836 remporta un succès formidable, il enflamma durablement l'Europe mais n’avait plus été joué dans ces murs depuis 1894. 

L’Opéra Comique ressuscite Le Postillon de Lonjumeau, une œuvre méconnue dans une mise en scène délicieusement kitsch et pétillante de Michel Fau, des décors pâtissiers et rococo d’Emmanuel Charles et des costumes d’époque colorés de Christian Lacroix. Le plateau vocal, l’énergie de la troupe et l’inventivité de la scénographie font passer trois heures savoureuses et détonantes.
Adolphe Adam soigne l’écriture des airs, des duos et des parties chorales exigeant une grande virtuosité des interprètes, dans le sillage enjoué de Rossini. Le sens du théâtre, une musique gaie, l’humour, la dérision, l’opéra-comique satisfait notre appétit de plaisirs simples. Dans le rôle-titre, 

Michael Spyres fait preuve de beaucoup d’abattage scénique et de talent pour incarner le postillon, capable d'assurer les moments de bravoure de la partition. Notamment ce contre-ré qui ouvre une carrière de divo d’opéra à Chapelou ! Florie Valiquette incarne Madeleine/Mme de Latour avec tout autant de qualités, comme Franck Leguérinel dans le rôle du marquis de Corcy qu’il campe avec brio.

Qui n’a pas en tête l’air célèbre "Oh Oh Oh qu’il était beau le postillon de Lonjumeau !"
Chapelou, un postillon joli-cœur abandonne Madeleine le jour des noces pour suivre le directeur de l’Opéra qui lui fait miroiter les attraits d’une carrière lyrique. Le marquis de Corcy entend "le plus beau contre-ré qu’il n’ait jamais ouï", ce qui fera tout basculer. Chapelou reviendra 10 ans plus tard sous le nom de Saint-Phar lors d’un séjour lyrique, retrouvant l’épouse délaissée sans la reconnaître. Madeleine entendant bien récupérer son mari, s’ensuivront stratagème, entourloupe, confusion, coup de théâtre et retour en grâce jusqu’au dénouement heureux. 

On doit cette comédie jubilatoire à Michel Fau. "Cette histoire de chant, de voix, de carrière lyrique et de travestissement avait tout pour me plaire" dit-il. Il se travestit dans le petit rôle de Rose, la servante de Madame de Latour. Emperruqué et en robe à paniers rose bonbon, quelques mimiques et interjections suffisent à provoquer l’hilarité du public. 

Mais on doit aussi à Christian Lacroix le plaisir des yeux, le retour de l’élégance et de la somptuosité des costumes (à faire pâmer les artisans de l’atelier Costumes de l’Opéra de Paris !). L’Opéra Comique lui a ouvert les portes de ses collections. D’où un éblouissant travail de créateur sur les costumes d’archives qu’il a transformés, accessoirisés dans son chromatisme favori. Chaque costume devient une création inspirée des poupées de porcelaine du XVIIIe, avec des détails exagérément grossis : chapeaux excessifs, échafaudages de fleurs en guise de perruque, jupes à panier. Un régal de couleurs et de recherche esthétique.

Dans la fosse, Sébastien Rouland emmène avec vitalité l’Orchestre de l'Opéra de Rouen Normandie et le Chœur Accentus. 

Une très bonne soirée d’où l’on ressort en chantonnant "Oh Oh qu’il était beau le postillon de Lonjumeau !"


Yannis Ezziadi (Louis XV), Alcindor (Laurent Kubla), Florie Valiquette (Madeleine), 
Sébastien Rouland (Direction musicale), Michel Fau (Rose), Michael Spyres (Chapelou), Franck Leguérinel (Corcy), Julien Clément (Bourdon) - Opéra Comique - 3 avril 2019


Photos © Stefan Brion / Opéra Comique


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire